Faire de l'hypersensibilité une chance
L'hypersensibilité à la lumière des neurosciences
Les recherches récentes en neurosciences permettent d’obtenir des réponses objectives. Je vous propose donc d'aborder ces questions une par une pour voir ce que la science en dit. Oui, il est tout à fait possible d'être à la fois très sensible et rationnel, et de faire ainsi de son hypersensibilité, une chance. Mieux comprendre l'hypersensibilité ouvre une large palette de choix pour mieux vivre avec.
Comment comprendre l’hypersensibilité
La thérapie, le coaching et l’hypnose aident à mieux comprendre l’hypersensibilité.
Imaginez un baromètre gradué de 1 à 10 pour mesurer votre sensibilité : où vous situeriez-vous ? Êtes-vous souvent bouleversé par la beauté d’un paysage ou d’une mélodie, au point d’en avoir les larmes aux yeux ? Ressentez-vous des émotions, qu’elles soient positives ou négatives, de manière intense ? Pouvez-vous rapidement capter l’humeur de ceux qui vous entourent ?
Si c’est le cas, vous faites peut-être partie des 25 à 30 % de la population qualifiés d’hypersensibles. Vous avez une sensibilité plus élevée que la moyenne.
Sur 100 personnes, 29 possèdent cette caractéristique invisible. Elle rend vos sensations plus nombreuses, subtiles et intenses, et accroît votre réactivité émotionnelle.
Bien entendu, il est nécessaire de développer votre capacité à réguler cette hypersensibilité émotionnelle . Se faisant, vous amplifiez aussi cette compétence à mieux la comprendre pour en faire un atout.
- Mais en quoi notre cerveau diffère-t-il de celui des autres ?
- Est-ce que cette particularité nous confère une intelligence émotionnelle supérieure ?
- Et comment vivre sereinement avec cette hypersensibilité ?
Pour commencer , examinons le première question. En quoi le cerveau d’une personne très sensible est-il différent de celui d’une personne moins sensible ?
Pour y répondre, il est nécessaire de s’entendre d’abord sur la définition de l’hypersensibilité.
Hypersensible: définition
En neurosciences, la sensibilité est la capacité à percevoir des informations du monde à travers nos sens.
Une odeur, un son, une couleur ou une douleur constitue ainsi la sensibilité sensorielle.
Cette capacité inclut également la réactivité émotionnelle face à ces perceptions, comme le fait d’être ému ou de répondre à un stimuli sensoriel.
Par exemple, être surpris par un son ou anticiper une situation en observant un changement d’expression sur un visage illustre cette compétence.
Ainsi, une sensibilité élevée englobe à la fois nos sensations et nos émotions. C’est un ensemble complexe de réactions au monde.
Comment identifier les personnes hypersensibles? Cela représente un véritable défi à relever afin d’aider à bien vivre avec l’hypersensibilité.
L’évaluation se fait à l’aide d’un questionnaire d’auto-évaluation. Il comporte une série d’affirmations auxquelles les personnes répondent par oui ou par non.
Bien que cet outil ne soit pas totalement scientifique, il a permis de constater qu’environ 25 à 30 % de la population présente une sensibilité plus prononcée que la norme générale.
Comprendre l'Hypersensibilité à l'aide des découvertes scientifiques
Afin de mieux comprendre l’hypersensibilité, la science a étudié les images cérébrales des personnes touchées par ce phénomène. Le cerveau des hypersensibles présente des caractéristiques distinctes qui les caractérisent.
Plutôt que d’utiliser le terme « hypersensibilité », qui peut avoir une connotation de saturation, il est préférable de parler de sensibilité élevée. Malgré le manque d’études approfondies sur le sujet, trois points importants ont été identifiés.
Tout d’abord, les personnes très sensibles semblent avoir une réactivité accrue au niveau cérébral. Les zones du cerveau liées à l’alerte, à la vigilance et à la réactivité semblent s’activer plus rapidement chez ces individus. Ces régions se situent dans la formation réticulée du tronc cérébral et montrent une activité mesurable à travers des micro-courants cutanés. Les personnes très sensibles réagissent plus rapidement à des stimuli tels que les sons, ce qui suggère que leur système sensoriel nécessite moins de stimulation pour se déclencher, les rendant plus réceptives aux informations subtiles.
Ensuite, il semble que les régions cérébrales impliquées dans l’analyse approfondie des stimuli sensoriels et émotionnels soient plus développées et actives chez les individus hypersensibles.
Par exemple, chez ceux sensibles aux sons, les zones cérébrales responsables de l’analyse des sons dans les lobes temporaux sont plus actives et présentent une densité plus élevée de matière grise et corticale par rapport aux moins sensibles.
De plus, les régions traitant des informations émotionnelles et sensorielles montrent une activité accrue chez les personnes hypersensibles lorsqu’elles sont exposées à des stimuli émotionnels.
Par exemple, l’amygdale, impliquée dans les réactions émotionnelles, s’active plus intensément chez les femmes sensibles ( cette faculté a été testé avec les stimuli sonores des pleurs d’enfants).
Ces observations suggèrent que le cerveau des personnes très sensibles est plus réceptif aux informations sensorielles et émotionnelles, ce qui explique leur attention plus soutenue à leur environnement.
L'empathie des hypersensibles
Enfin, les régions cérébrales associées à l’empathie semblent être plus actives chez les individus très sensibles.
Les neurones miroirs dans les lobes frontaux, en particulier dans l’insula, sont plus actifs chez ces personnes.
Ces zones cérébrales « s’allument » lorsque les personnes hypersensibles voient des expressions faciales de tristesse ou de joie. Cela pourrait expliquer pourquoi les personnes très sensibles ressentent et partagent intensément les émotions des autres.
En résumé, le cerveau des personnes hypersensibles se caractérise par une réactivité accrue, une activité plus prononcée dans les régions liées au traitement émotionnel et sensoriel, ainsi qu’une plus grande implication des régions favorisant l’empathie affective.
Les études pour mieux comprendre l’hypersensibilité démontrent qu’une sensibilité élevée semble donc être une réalité.
Leurs différences dans le traitement des sensations et des émotions pourraient-elles conférer aux personnes très sensibles une intelligence émotionnelle supérieure ?
Comment vivre et comprendre son hypersensibilité?
Comment gérer efficacement une sensibilité élevée au quotidien et vivre avec l’hypersensibilité?
La clé réside dans l’utilisation du cortex préfrontal, comme le soulignent les découvertes en neurosciences. Lorsque vous faites face à une situation émotionnelle, deux acteurs principaux interviennent dans votre cerveau : le cortex préfrontal et l’amygdale. L’amygdale réagit de manière plus intense lorsque la situation est importante pour vous, induisant ainsi du stress, de la colère et de l’anxiété, ce qui intensifie votre expérience émotionnelle.
Cette réaction de l’amygdale est automatique et dépend de votre analyse inconsciente de la situation. En revanche, le cortex préfrontal réalise une analyse plus rationnelle et vous aide à décider des actions à entreprendre. Lorsque l’activité du cortex préfrontal augmente, l’activité de l’amygdale diminue automatiquement, ce qui réduit l’intensité émotionnelle subjective.
Il est donc envisageable de réguler volontairement votre intensité émotionnelle en stimulant votre cortex préfrontal.
Diverses études pour mieux comprendre l’hypersensibilité ont démontré que des techniques simples peuvent effectivement activer le cortex préfrontal: prendre de la distance émotionnelle, se distraire, relativiser, revoir la situation de manière positive ou se projeter dans des actions concrètes.
Accepter ses émotions, les accueillir et les laisser venir permet généralement de les vivre plus aisément et de diminuer leur intensité.
Comprendre la relation entre le cortex préfrontal et l’amygdale peut déjà entraîner un effet régulateur.
Comment la thérapie comportementale cognitive, l'hypnothérapie et le coaching peuvent t'aider à réguler l'hypersensibilité?
L’hypersensibilité n’est pas une maladie en soi, mais elle peut être exacerbée dans des contextes comme l’anxiété, la dépression ou des situations traumatisantes.
Le traitement en thérapie de ces difficultés est prioritaire. Le processus permet aussi de mieux comprendre l’hypersensibilité (et de la sensibilité élevée). Ainsi, la régulation des émotion participe à l’obtention de résultats durables et efficaces.
Alors, bien vivre avec l’hypersensibilité est possible.
Les TCC , ainsi que l’hypnose et la thérapie EMDR répondent efficacement aux problématiques de l’hypersensibilité.
La sensibilité exacerbée est une réalité qui façonne vos comportements. il existe d’autres caractéristiques invisibles telles que vos aptitudes intellectuelles, votre personnalité et vos expériences passées.
De nombreuses personnes vivent harmonieusement avec leur hypersensibilité, en la régulant et l’acceptant pleinement.
Une hypersensibilité élevée peut devenir une source précieuse d’informations sur le monde, les autres et vous-même, vous rendant plus perspicaces, flexibles.
En conclusion, il ne faut pas sous-estimer la sensibilité de chacun, car elle renferme en réalité son génie, comme l’exprimait Baudelaire.
Apprendre à utiliser au mieux ses émotions
De façon générale, mieux comprendre l’hypersensibilité et bien vivre avec cette caractéristique suppose de savoir mobiliser un certain nombre de compétences émotionnelles qui sont plus ou moins développées chez les différents individus, mais que l’on peut exercer et cultiver.
Quelles sont-elles ?
- 1) accueillir et identifier les émotions ;
- 2) les comprendre ;
- 3) les exprimer ;
- 4) les réguler ;
- 5) savoir les utiliser à bon escient,
D’après la typologie définie par la chercheuse en psychologie de l’université catholique de Louvain Moïra Mikolajczak.
cette hypersensibilité
1) Accueillir
C’est une condition nécessaire pour avancer vers la sécurité émotionnelle et accepter l’intelligence émotionnelle particulière. Si cela semble simple au premier abord, c’est pourtant l’étape la plus difficile pour beaucoup de personnes très sensibles.
La première chose à faire est d’être en mesure de détecter et identifier ses propres émotions.
On mobilise à cet effet différentes techniques qui permettent d’identifier une émotion naissante (avant qu’elle ne devienne un ouragan) à travers les signaux physiques et les pensées. Par exemple la technique de « la météo intérieure » : il s’agit de s’arrêter trois minutes, à différents moments de la journée (idéalement trois fois), afin de scanner l’état de tension (ou de détente) physique de notre corps dans un premier temps, puis de laisser émerger les émotions associées. En développant cette technique, on devient petit à petit plus attentif aux signaux discrets de nos émotions et on y adapte ses comportements.
Une fois l’émotion identifiée, il s’agit de l’accueillir pour ce qu’elle est, sans chercher à la mettre à distance. Il arrivera parfois que certaines craintes associées au vécu émotionnel (comme le fait de pleurer en public) doivent être levées. Le thérapeute peut alors amener la personne à dédramatiser ces situations et réfléchir avec elle à des solutions d’adaptation comme prévenir l’entourage de possibles accès de larmes, ou éviter des situations « trop risquées » quand elles ne sont pas indispensables. Cette nouvelle compétence , une fois acquise permet alors aux personnes de mieux comprendre leur hypersensibilité grâce à l’acceptation.
2) Comprendre
C’est la deuxième étape : décrypter et interpréter le message porté par les émotions. Afin de comprendre l’hypersensibilité, il s’agit de mettre en lien l’émotion (et son intensité) avec la situation qui l’a déclenchée, et d’identifier les besoins sous- jacents. Par exemple, la remarque désagréable d’un collègue n’aura pas la même répercussion sur quelqu’un qui a besoin d’être rassuré sur ses compétences, et sur quelqu’un doté d’une bonne confiance en soi. Connaître ses besoins permet de comprendre l’amplitude de certaines réactions émotionnelles, pour mieux les réguler ensuite.
3) Exprimer
Cette fois, il s’agit d’apprendre à extérioriser intelligemment ses émotions et vivre avec l’hypersensibilité. Certaines personnes hypersensibles mobilisent beaucoup d’énergie afin de masquer leurs ressentis aux yeux des autres, alors que d’autres sont sujettes aux éclats, débordées par les émotions qui les traversent. Dans un cas comme dans l’autre, le but de l’expression émotionnelle, à savoir un partage de son vécu qui puisse être reçu par l’entourage, n’est pas atteint. La solution est alors de mettre des mots sur ce qu’on vit, d’abord pour soi, afin d’être capable de le partager dans un second temps avec l’autre, de manière à être entendu (de la bonne manière, au moment propice, etc.).
4) Réguler
C’est la demande la plus importante en thérapie : le besoin de gérer le flot émotionnel intense auquel font face les personnes hypersensibles. Ainsi elle parviennent enfin à comprendre l’hypersensibilité qu’elles subissent.
Bonne nouvelle, il existe de nombreux outils de régulation.
Certains apprennent à voir les situations autrement : en imaginant ce qu’un extraterrestre penserait de cette situation, ou bien en en repérant aussi les avantages.
D’autres approches visent à réorienter l’attention, en se projetant dans un lieu plaisant et sécurisant pour diminuer l’intensité de l’anxiété, par exemple.
En tout cas, lorsque la personne se réconcilie avec ses émotions, les accueille et les exprime, ces dernières prennent généralement moins d’ampleur et deviennent moins dérangeantes. Cela lui permet de vivre avec l’hypersensibilité.
5) Exploiter
Enfin, au fil du temps, la grande sensibilité devient une ressource dans le domaine émotionnel, relationnel et décisionnel. D’ailleurs, il n’est pas nécessaire d’aider les individus hypersensibles spécifiquement à développer cette compétence.
Elle va de soi lorsqu’une personne se sent vivre avec l’hypersensibilité
Sources :
Voici quelques références sur l’hypersensibilité en psychologie que vous pourriez trouver intéressants :
- « Hypersensibilité ou hyperémotivité émotionnelle« : auteur docteur Nicolas Neveux. Résumé : Hypersensibilité ou hyperémotivité émotionnelle: découvrez ses signes, ses mécanismes et comment la gérer pour mieux vivre.
« La sensibilité au traitement sensoriel et son association aux problèmes intériorisés chez l’enfant » Université de Québec à Trois Rivière … d’éclaircir la définition de l’hypersensibilité et d’examiner le lien entre la SPS (trouble de l’intégration sensorielle) et le développement de problèmes intériorisés chez les enfants par …
L’hypersensibilité: qu’en dit la science? Conférence live avedc Nathalie Clobert. Résumé : Sens très affûtés, émotions à fleur de peau, empathie parfois débordante : les hypersensibles réagissent à la moindre perturbation de leur environnement. Cette caractéristique est-elle en partie génétique ? Cette conférence propose des critères objectifs pour quantifier ce trait, pour évaluer les difficultés et les forces qu’il peut conférer, et apprendre les techniques ainsi que les bons réflexes pour gérer ses émotions au quotidien, afin de faire de son hypersensibilité une force et non un handicap.